Comment retirer de l’argent de votre société ?

Un dirigeant souhaite qu’à la fin de l’année, sa société lui verse 5 000 ou 10 000 € en plus de son salaire habituel.

Comment retirer de l’argent de votre société ?

Un dirigeant souhaite qu’à la fin de l’année, sa société lui verse 5 000 ou 10 000 € en plus de son salaire habituel. Pour ce faire, il peut s’octroyer un supplément de salaire, retirer de l’argent par le biais de son compte courant (C/C), se faire attribuer un dividende intercalaire ou distribuer des réserves réincorporées. Quelles sont les implications fiscales pour vous et votre société ?

       I.            Un supplément de salaire

En tant que dirigeant, vous pouvez décider de prélever un supplément de salaire de votre société. Toutefois, mieux vaut alors en informer votre secrétariat social et/ou votre comptable avant de faire transférer le salaire sur votre compte bancaire privé, afin qu’ils puissent calculer le montant du précompte professionnel (Pr P) sur ce supplément de salaire.

Le supplément de salaire sera ajouté à votre salaire normal. Après déduction de vos cotisations sociales et de vos autres frais professionnels forfaitaires ou réels, ce montant, augmenté de vos autres revenus professionnels et de vos éventuels revenus immobiliers, sera imposé aux taux progressifs. Si votre revenu total imposable aux taux progressifs dépasse 42 370 € (année de revenus 2022), vous paierez le taux le plus élevé de l’IPP, soit ± 53,5 % (50 % + additionnels communaux) sur votre supplément de salaire. En outre, en principe, vous serez également redevable de cotisations sociales.

Le supplément de salaire, en ce compris le Pr P à retenir sur celui-ci, est entièrement déductible pour votre société. Le coût net pour cette dernière correspond donc au montant brut moins l’impôt des sociétés qu’elle économise grâce à la déduction.

    II.            Prélèvement via votre C/C

Vous, dirigeant, pouvez aussi effectuer une prélèvement d’argent via votre C/C. Il vous suffit alors de transférer le montant souhaité du compte bancaire de la société vers votre propre compte. Vous avez alors toutefois intérêt à établir le document requis en matière de «conflit d’intérêts», ou à demander à votre comptable de le faire pour vous.

Elles dépendent de l’état de votre C/C au moment du prélèvement. S’il est à zéro ou «débiteur», vous créez ou augmentez votre dette envers votre société. En outre, si vous ne payez pas d’intérêts sur cette dette, vous serez taxé chaque année sur un ATN prêt gratuit. Cependant, si votre compte est créditeur, c’est votre société qui vous doit de l’argent. Par conséquent, un prélèvement via votre C/C constitue un remboursement de cette dette par votre société, qui est exonéré d’impôt.

La réduction de votre crédit ou l’augmentation de votre dette en C/C n’est pas une dépense déductible pour votre société. Il n’y a pas non plus d’autres implications fiscales pour cette dernière, sauf si vous lui versez des intérêts, car il s’agit alors d’un revenu imposable dans son chef. Si elle vous verse des intérêts pour une dette en C/C, ils constituent en principe une dépense déductible.

 III.            Un dividende intercalaire

À moins que les statuts n’autorisent les acomptes sur dividendes, vous ne pouvez pas, en tant qu’administrateur, décider seul de faire verser un dividende intercalaire par votre société. Vous devez organiser une assemblée générale extraordinaire (AGE) qui attribuera le dividende provenant des réserves, ce qui ne nécessite pas d’intervention d’un notaire.

Un dividende doit normalement être attribué à tous les actionnaires. Par conséquent, s’il y a d’autres actionnaires que vous, le dividende ne vous revient pas en totalité. N’oubliez pas non plus que le montant distribuable est limité en fonction du test de l’actif net et (dans une SRL) du test de liquidité.

Vous payez le précompte mobilier (Pr M) sur le dividende. Le taux normal est de 30 %, mais si les conditions du régime «VVPR-bis» sont remplies, il n’est que de 20 % ou 15 %. Si le dividende provient d’une réserve de liquidation datant d’au moins cinq ans, le taux du Pr M est même de 5 %. S’il provient d’une réserve de liquidation créée il y a moins longtemps, il est de 20 %.

Les dividendes ne sont pas déductibles. La distribution de dividendes n’a pas d’autres conséquences en matière d’impôt des sociétés, si ce n’est une réduction de la «limite de requalification» des intérêts en dividendes.

IV.            Distribuer des réserves réincorporées

S’il reste des réserves «réincorporées» dans le capital de votre société, ou dans ses fonds propres indisponibles pour les sociétés sans capital (SRL, SNC, SComm et SC), vous pouvez les distribuer en tout ou partie, mais toujours dans les limites des tests de l’actif net et de liquidité. Vous devez tenir une AGE pour la distribution de ces réserves. Si vous n’avez pas encore adapté les statuts de votre société au nouveau droit des sociétés (CSA), cette AG doit le faire. Et, à moins que votre société ne soit une SComm, une SNC ou une SCRI, cette AGE doit avoir lieu devant notaire.

La distribution des réserves réincorporées est totalement exonérée d’impôts. Votre société ne doit donc pas retenir de Pr M dessus et vous ne devez pas non plus le mentionner dans votre déclaration privée.

La distribution des réserves réincorporées n’est pas une dépense déductible pour votre société, contrairement aux frais de notaire. Il n’y a pas d’autres conséquences fiscales, si ce n’est que la «limite de requalification» des intérêts en dividendes diminue.

   V.            Tableau récapitulatif

 

Supplément de salaire

Prélèvement via C/C

Dividende intercalaire

Réserves réincorporées

Qui décide ?

les administrateurs

les administrateurs

AG spéciale

AG extraordinaire

Déductible ?

oui

non

non

non

Notaire nécessaire ?

non

non

non

oui

Pr P ou Pr M ?

Pr P

ni l’un ni l’autre

Pr M

ni l’un ni l’autre

Combien de Pr P/Pr M ?

0 %-50 %

-

5 %-30 %

-

Cotisations sociales ?

oui

non

non

non

Avantages

évitez l’éventuelle exclusion du taux réduit de l’ISoc

intéressant si votre C/C est créditeur

éventuellement seulement 5 % de Pr M

combiner avec l’adaptation des statuts au nouveau droit des sociétés

Inconvéneients

généralement l’option la plus coûteuse

déconseillé si C/C débiteur : le montant prélevé devra être remboursé + ATN prêt gratuit

  1. en principe pour tous les actionnaires
  2. tests de l’actif net/de liquidité
  1. pour tous les actionnaires
  2. tests de l’actif net/de liquidité
  3. adaptation obligatoire des statuts au nouveau droit des sociétés