Administrateur en personne physique ou via une société ?

Outre le fait qu’une personne physique puisse être administrateur d’une SRL, une société peut aussi en être l’administrateur. Regardons les avantages de cette dernière option.

Administrateur en personne physique ou via une société ?

Outre le fait qu’une personne physique puisse être administrateur d’une SRL, une société peut aussi en être l’administrateur. Regardons les avantages de cette dernière option.

       I.            Limiter la responsabilité personnelle

La responsabilité en tant qu’actionnaire d’une SRL est limitée. Si les choses tournent mal pour la société, en principe, un actionnaire ne peut pas perdre plus, à titre privé, que ce qu’il a apporté à la société ou que ce qu’il a payé pour les actions. Toutefois, si l’actionnaire est aussi administrateur d’une société, il y a «responsabilité d’administrateur». L’administrateur est dès lors responsable, sur son patrimoine privé, des fautes commises en tant qu’administrateur, vis-à-vis de sa SRL, mais aussi, pour certaines fautes (e.a. les infractions aux règles du droit des sociétés) vis-à-vis de tiers, p.ex. les banques, les fournisseurs ou le fisc.

Si une société est nommée comme administrateur, c’est elle qui devient responsable de ces fautes de gestion. Si cette société est elle-même une SRL, la responsabilité personnelle est limitée. À première vue, via le remplacement par une société en tant qu’administrateur, l’impact d’éventuelles erreurs de gestion sur votre patrimoine personnel peut être limité. Cela ne fonctionne toutefois pas.

Il était autrefois possible de limiter la responsabilité d’administrateur de cette manière, mais ce n’est plus le cas depuis longtemps. Lorsqu’une société est nommée administrateur d’une autre société, une personne physique doit être désignée comme «représentant permanent» de la société-administrateur. Et cette personne physique a la même responsabilité que la société-administrateur, et peut donc aussi être tenue personnellement responsable en cas de faute de gestion (art. 2:55 CSA) . Ce représentant permanent peut éventuellement être un employé de la société-administrateur ou même un tiers, mais, en pratique, il s’agit généralement de la personne qui est administrateur de la société-administrateur, c.-à-d. vous-même.

    II.            Economies d’impôts

La rémunération des dirigeants d’entreprise est lourdement imposée. Celle qu’une personne physique reçoit, en tant qu’administrateur de sa société est imposée au taux progressif à l’impôt des personnes physiques. Sur la partie de la rémunération imposable qui dépasse 41 360 €, l’administrateur est imposé à un taux moyen de 53,5 % (50 % + les additionnels communaux moyens de 7 % sur ces 50 %) pour l’année de revenus 2022. En outre, il faut également payer des cotisations de sécurité sociale sur la rémunération imposable : 20,5 % jusqu’à un revenu imposable de 60 638,46 € et 14,16 % sur la partie comprise entre 60 638,46 € et 89 361,89 € (plafonds pour l’année de revenus 2021).

Imposé à un taux plus faible dans une société ? Si l’administrateur est lui-même une société et que, par conséquent, ses indemnités aboutissent dans cette société (au lieu de vous être versées à titre privé), elles sont imposées à l’impôt des sociétés, dont le taux n’est que de 25 %, voire, si les conditions sont remplies, de 20 % (taux réduit). Si une personne physique devient ensuite administrateur de la société en son nom propre, une rémunération plus faible peut être retirée, sur laquelle l’administrateur-personne physique paiera moins d’impôts et de cotisations sociales.

Tout d’abord, un tel choix n’a de sens que si la personne physique n’a pas besoin de la totalité de la rémunération de dirigeant que lui verse actuellement la société. Si la personne physique se fait verser par la société-administrateur un salaire identique à celui que versait la première société, il faudra évidemment continuer à payer le même montant d’impôts et de cotisations sociales. Deuxièmement, il faut tenir compte du fait que les indemnités d’un administrateur de société ne comptent pas comme une «rémunération minimale» en ce qui concerne le taux réduit. La société dans laquelle une personne physique n’est plus administrateur en son nom propre peut donc perdre le bénéfice de ce taux réduit, et payer 25 % d’impôts sur l’ensemble de ses revenus, au lieu de seulement 20 % sur la partie jusqu’à 100 000 €. Troisièmement, la constitution et le fonctionnement d’une société supplémentaire entraînent aussi des frais (comptabilité, publications, impôts, etc.) qu’il faut déduire de vos économies d’impôt.

Exemple pratique. Une personne physique administre en son nom propre la SRL A, dont le bénéfice imposable est de 100 000 €, avant la déduction de sa rémunération de 45 000 €. Celle-ci est donc suffisante pour bénéficier du taux réduit, et nous supposons que les autres conditions permettant d’avoir droit à ce taux sont également remplies. Nous comparons ensuite le montant total des impôts et des cotisations sociales dans cette situation (situation 1) avec ce qu’il faudrait payer si la personne physique nommait la SRL B en tant qu’administrateur de la SRL A, en lui accordant des indemnités d’administrateur de 45 000 €. Nous supposons qu’on ne retire alors de SRL B que la rémunération minimale nécessaire pour bénéficier du taux réduit, soit la moitié de 45 000 €, c.-à-d. 22 500 € (situation 2). Nous verrons ensuite quel serait le résultat si on ne créait pas une deuxième société, mais en réduisant seulement le salaire de la SRL A à 22 500 € (situation 3). Nous supposons que la personne physique est célibataire et sans enfant, n’a pas d’autres revenus imposables sur le plan privé et que les additionnels communaux sont de 7 %.

 

Situation 1

Situation 2

Situation 3

 

 

SRL A

SRL B

 

bénéfice brut société

100 000,00

100 000,00

45 000,00

100 000,00

indemnités d’admnistrateur société

− 45 000,00

rémunération de dirigeant d’entreprise

− 45 000,00

− 22 500,00

− 22 500,00

bénéfice imposable société

55 000,00

55 000,00

22 500,00

77 500,00

impôt des sociétés

11 000,00

13 750,00

4 500,00

19 375,00

rémunération de dirigeant d’entreprise

45 000,00

 

22 500,00

22 500,00

impôts + cotisations sociales pour vous

19 151,02

 

6 959,50

6 959,50

impôts totaux + cotisations sociales

30 151,02

25 209,50

26 334,50

Cet exemple simple démontre que, dans la situation 2, la personne physique économise environ 5 000 € par an. Toutefois, il faut déduire de cette économie les coûts supplémentaires de 1 000 à 2 000 € liés à la SRL B. De plus, dans la situation 2, sa rémunération est réduite de moitié par rapport à celle de la situation 1. Si une telle réduction de salaire est possible, une économie d’impôt presque égale peut être réalisée en appliquant simplement cette réduction dans SRL A, donc sans avoir besoin d’une société supplémentaire.

 III.            Raisons d’organisation

Pour celui qui n’a pas seulement une société, mais tout un groupe de sociétés, il peut être pratique de rassembler l’infrastructure et le personnel nécessaires à la gestion, l’administration et la comptabilité de toutes les sociétés dans une seule société. Cette société, dont la personne physique est administrateur à titre privé, est ensuite désignée comme administrateur de toutes les autres sociétés. Dans un tel contexte, une plus grande optimisation fiscale sera normalement possible, ne serait-ce que parce qu’on n’a pas besoin d’un gros salaire de toutes les sociétés.

Il y a plusieurs administrateurs. Si la société compte plusieurs administrateurs personnes physiques, il faut alors tenir compte de ce que tout le monde n’a pas les mêmes souhaits concernant la composition du «package» salarial et des avantages de toute nature y afférents. Si chacun crée sa propre société, et que celles-ci sont ensuite nommées administrateurs de la société d’origine et reçoivent des indemnités d’administrateur en argent, chacun peut alors décider du montant des revenus à percevoir de la société, et sous quelle forme (p.ex. sous forme de salaire en argent, d’avantage de toute nature, de dividende, de loyer, de primes pour une pension complémentaire, etc.), et ce sans avoir à en rendre compte aux autres.