La réalisation d'actifs

Nous nous intéressons ici aux questions pouvant surgir lors de la réalisation de certains actifs.

La réalisation d'actifs

1. Introduction

Dans ce chapitre nous nous intéressons aux questions pouvant surgir lors de la réalisation de certains actifs.

Notre intention n’est cependant pas de commenter tous les types possibles de réalisations. Les ventes courantes de marchandises sont aussi des formes de réalisation d’actifs.

2. Plan comptable

Lors des réalisations d’actifs, aussi bien des plus-values que des moins-values peuvent être constatées.

 

Moins-value

Plus-value

Réalisations courantes d’immobilisations corporelles1

641

741

Réalisations non récurrentes d’immobilisations incorporelles et corporelles

6630

7630

Réalisations d’immobilisations financières

6631

7631

Réalisations de créances commerciales2

642

742

Réalisations d’actifs circulants (autres que créances commerciales)

652

752

1 L’on constate qu’il n’y a pas de concordance entre les plus-values et les moins-values. Ce n’est que dans la version néerlandophone du PCMN que le compte 641 peut être utilisé pour des moins-values sur réalisations courantes d’immobilisations (sans précision). Dans la version francophone, le compte 641 est uniquement destiné aux moins-values sur les réalisations d’immobilisations corporelles. Il est conseillé de limiter l’utilisation du compte 641 aux moins-values sur réalisations d’immobilisations corporelles.

2 L’article 3:90 AR CSA précise que les moins-values sur réalisation de créances commerciales sont comptabilisées au compte 642 ; sauf si ces moins-values correspondent à un escompte ; l’escompte sera alors imputé à la rubrique « V.C. Autres charges financières ».

3. Moment de la réalisation

Les principes généraux relatifs au moment de la réalisation sont commentés à la partie 2, chapitre 21 de cet ouvrage.

L’avis CNC 2012/17 relève qu’en en cas de vente d’immeuble, il est fréquent que les parties conviennent de différer le moment du transfert de propriété (et des risques sur le bien) jusqu’au moment de la passation de l’acte authentique.

Supposons que l’entreprise vende un immeuble figurant parmi ses immobilisations corporelles. Le prix de vente de l’immeuble excède sa valeur comptable, de sorte que l’entreprise réalise une plus-value sur son immeuble. Les parties signent le compromis l’année X mais conviennent que la propriété sur l’immeuble ne sera transférée à l’acheteur qu’au moment de la passation de l’acte authentique, l’année X+1.

On enregistrera au titre de produits la plus-value réalisée sur l’immeuble pour l’exercice de la passation de l’acte authentique, soit l’année X+1.

En revanche, si les parties ne prévoient rien dans le compromis au sujet du moment du transfert de propriété, ce transfert interviendra, conformément l’article 1583 CC, au moment de l’accord des parties sur la chose et sur le prix et c’est à ce moment que devra être actée la plus-value réalisée sur l’immeuble.

L’approche est identique en cas de moins-value de réalisation.

4. Sale and lease back

Pour les contrats de sale and lease back, les plus- ou moins-values réalisées ne sont pas portées immédiatement au compte de résultats :

« La plus-value ou la moins-value constatée lors de la cession d’une immobilisation corporelle amortissable assortie de la conclusion par le cédant d’un contrat de location-financement portant sur le même bien, est inscrite en compte de régularisation et est portée chaque année au compte de résultats proportionnellement à l’amortissement de cette immobilisation détenue en location-financement afférent à l’exercice considéré » (art. 3:41 AR CSA).

Exemple

À l’occasion d’une réorganisation, une société vend ses machines à une société de leasing et les reprend immédiatement en leasing.

La situation dans les livres est la suivante :

·  Matériel : valeur d’acquisition : 350.000,00

·  Matériel : amortissements actés : 200.000,00

·  Valeur nette : 150.000,00

·  Prix de vente (hors TVA) : 200.000,00

·  Profit lors de la réalisation de l’immobilisé : 50.000,00

La société conclut un contrat de leasing qui a trait aux actifs cédés. De ce fait, le profit réalisé ne peut être pris immédiatement en résultats. Le montant de 50.000,00 EUR est porté au compte 493 « Produits à reporter ».

Si les machines prises en leasing sont amorties de manière linéaire en cinq ans, la plus-value de 50.000,00 EUR sera transférée en résultats à concurrence de 10.000,00 EUR par an et ainsi, la partie des amortissements couvrant le profit comptabilisé précédemment sera compensée.

493

Produits à reporter

10.000,00

 

763

À

Plus-values sur réalisations d’immobilisations

 

10.000,00

         

5. Plus-value de réalisation avec exonération fiscale temporaire

Lors de la réalisation de certains immobilisés, le CIR autorise la taxation étalée sous certaines conditions. Comme l’exonération fiscale est de nature temporaire, il y a lieu de tenir compte de la dette fiscale latente. Cette matière est réglementée, en comptabilité, à l’article 3:54 AR CSA :

« § 1. Les impôts différés sur les subsides en capital et les plus-values réalisées sont initialement évalués au montant normal de taxation qui les aurait frappés, si ces subsides et plus-values avaient été taxés à charge de l’exercice au cours duquel ils ont été actés. Ils le sont cependant sous déduction de l’effet des réductions et immunisations dont il est probable, au moment où ces subsides et ces plus-values sont actés, qu’il résultera, dans un avenir prévisible, une diminution de la charge fiscale afférente à ces subsides et ces plus-values.

§ 2. Les impôts différés afférents aux subsides reçus en capital font l’objet d’une réduction échelonnée par imputation au compte de résultats à la rubrique « Prélèvements sur les impôts différés » au rythme de la réduction des subsides en capital figurant à la rubrique du passif auxquels ils sont afférents.

Les impôts différés afférents aux plus-values réalisées font l’objet d’une réduction échelonnée par imputation au compte de résultats à la rubrique « Prélèvements sur les impôts différés » au rythme de l’inclusion dans le résultat imposable des plus-values en cause.

§ 3. Sauf l’application du paragraphe 2, le montant des impôts différés inscrits au passif ne fait l’objet d’une correction que dans la mesure où, à la suite d’une modification de la situation fiscale de la société, de l’ASBL, de l’AISBL ou de la fondation, il est probable que le montant effectif de la charge fiscale estimée afférente dans un avenir prévisible à ces subsides et plus-values s’écartera de manière significative du montant figurant au passif. »

Exemple

Un immobilisé totalement amorti est réalisé avec une plus-value de 12.000,00 EUR. Le taux d’imposition est de 25 %.

Le profit réalisé est comptabilisé en 763.

Pour bénéficier de l’avantage fiscal, il faut comptabiliser l’écriture suivante :

680

Transfert aux impôts différés

3.000,00

 

689

Transfert aux réserves immunisées

9.000,00

 

1682

À

Impôts différés sur plus-values réalisées sur immobilisations

 

3.000,00

132

 

Réserves immunisées

 

9.000,00

Dans le délai fiscal imparti, un réemploi valable en immobilisations amortissables est effectué. Ces actifs sont amortis en dix ans. Les comptes 132 et 1682 sont transférés à concurrence des amortissements au compte de résultats. Chaque année l’écriture comptable suivante est passée :

1682

Impôts différés sur plus-values réalisées sur immobilisations

300,00

 

132

Réserves immunisées

900,00

 

780

À

Prélèvements sur les impôts différés

 

300,00

789

 

Prélèvements sur les réserves immunisées

 

900,00

Au cours de la sixième année après le remploi, et donc après 50 % de transfert, la société subit d’importantes pertes et ne prévoit pas devoir payer d’impôts avant de très nombreuses années. Le compte impôts différés subsistant au bilan s’élève à 1.500,00 EUR (3.000,00 – 5 x 300,00). Vu la nouvelle situation fiscale, il n’y a plus lieu de maintenir les impôts différés au bilan.

La correction s’effectue via un transfert direct entre les comptes 132 et 1682 (avis CNC 2013/14 et 121/3).

1682

Impôts différés sur plus-values réalisées sur immobilisations

1.500,00

 

132

À

Réserves immunisées

 

1.500,00

         

6. Cession de la nue-propriété d’un bien immeuble que la société possède en pleine propriété

Étant donné que la cession de la nue-propriété s’analyse comme une réalisation partielle de la propriété, il importe de déterminer la partie en usufruit et la partie en nue-propriété, au moment de la cession de la nue-propriété, de la valeur pour laquelle la pleine propriété de l’immeuble est portée dans les comptes du cédant. Pour la détermination de la part respective de l’usufruit et de la nue-propriété, il paraît indiqué d’adopter une règle proportionnelle à appliquer à la valeur comptable.

Ainsi, la CNC est d’avis que, si compte tenu des caractéristiques de l’usufruit et de sa durée, sa valeur représente, au moment de l’opération, 60 % de la valeur de la pleine propriété, le prix de cession de la nue-propriété s’imputera au compte « Terrains et constructions » à concurrence de 40 % de la valeur comptable de l’immeuble et en résultats (plus-values ou moins-values sur réalisation d’actifs immobilisés) pour la différence entre le prix obtenu et ce premier montant (avis CNC 2015/5).

7. Certification des actions et autres titres

En principe, lorsqu’un actionnaire originaire reçoit des certificats en échange d’actions qu’il détenait préalablement, il conserve l’ensemble des avantages économiques liés aux actions et en supporte également l’essentiel des risques (risque de cours, dividendes…). Le certificat représente en effet l’ensemble des droits économiques liés aux actions. Par ailleurs, à terme, sa situation reste inchangée puisque le titulaire de certificats peut toujours, tôt ou tard, demander l’échange des certificats contre les actions. La CNC est donc d’avis que l’opération par laquelle un actionnaire transfère des actions à un véhicule qui lui remet des certificats en échange n’emporte pas la réalisation des actions certifiées et ne donne pas lieu à l’expression d’un résultat réalisé (plus ou moins-value réalisée).

Le transfert des certificats entraîne bien entendu la réalisation de ceux-ci et, le cas échéant, l’expression d’un résultat. Dans cette hypothèse, ce n’est toutefois pas la certification en tant que telle qui entraîne la réalisation des droits économiques liés aux actions mais le transfert des certificats à des tiers (avis CNC 178/1).

8. Le vol ou la destruction d’un actif immobilisé

Lorsqu’un actif immobilisé est volé, ou de façon générale est sinistré, il ne peut être maintenu à l’actif. Il faudra dès lors comptabiliser, selon les cas, un amortissement non récurrent (comptes du groupe 660) ou une réduction de valeur non récurrente (comptes du groupe 660). Les comptes de moins-values de réalisation (641 et 663) ne peuvent pas être utilisés : la sortie du patrimoine, suite à un vol ou un autre sinistre, n’est pas une réalisation.

La question a été posée s’il faut tenir compte de l’indemnité payée par l’assurance pour déterminer le montant de la charge non récurrente.

Compte tenu de l’interdiction de compenser des charges et produits, inscrite à l’art. 3:2, § 2, AR CSA, l’indemnité obtenue de l’assurance ne peut pas être portée en déduction de la valeur résiduelle de l’actif pour déterminer, en net, le montant de la charge non récurrente à enregistrer.

Dans la situation décrite ci-dessus, l’indemnité obtenue sera comptabilisée à un compte 764 à 768.

Exemple

Prenons comme exemple le vol d’un actif comptabilisé sous la rubrique « mobilier et matériel roulant » :

Prix d’acquisition :

2.500,00 EUR

Amortissements antérieurs :

1.000,00 EUR

Valeur résiduelle :

1.500,00 EUR

Comme l’actif est sorti du patrimoine de la société, il ne peut plus figurer dans les comptes de la société, ce qui donne lieu à la comptabilisation d’un amortissement exceptionnel :

2409

Amortissements sur mobilier et matériel roulant

1.000,00

 

6602

Amortissements non récurrents sur immobilisations corporelles

1.500,00

 

2400

À

Mobilier et matériel roulant

 

2.500,00

 

Extourne actif X volé

   
         

Comme le montant perçu indemnise une charge non récurrente, l’indemnité sera portée en produits non récurrents :

550

Banque

900,00

 

764

À

Autres bénéfices d’exploitation non récurrents

 

900,00

 

Remboursement assurance suite au vol actif X

   
         

Le résultat non récurrent net s’élèvera à 600,00 EUR, soit le montant de la perte non couvert par l’indemnité perçue de la compagnie d’assurances.